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4 mars 2010

La régle du jeu

« Je ne sais pas si j’ai envie d’accepter tes règles du jeu », m’a-t-il dit avec un léger sourire cynique.
Quel jeu ? Quelles règles ? Je n'ai en réalité été surprise qu'un instant avant de comprendre, avec stupeur, ce qu'il voulait dire.

L’amour (et toutes ses variations subtiles et sournoises sur le grand nuancier des relations modernes) n’est-il donc qu’un « jeu » ?

Peut-être après tout. Chacun avance prudemment ses pions, se cache derrière ses cartes, espère une bonne pioche, bluffe -fait parfois double jeu- et compte les points… Mais encore faut-il partager les mêmes règles pour pouvoir jouer. Chacun suit la sienne et tente, inconsciemment de l’imposer. Chacun s'accroche à ses principes, son mode d'emploi.

Je tente de faire fondre la façade, de détacher le masque au demi sourire ironique, je lutte pour ouvrir cette porte derrière laquelle il se dissimule, derrière laquelle se cache tout ce qui le constitue, ce fabuleux trésor : son être. Partager cet or, le seul qui me fasse rayonner.
Je grappille, picore tout ce qui me rapproche de cette vérité, cette profondeur, cette intimité là. L’intimité qui m’intéresse le plus, qui me captive pour laquelle je continue de chercher, d’attendre, d’essayer. Désespérément. La seule intimité qui peut me réchauffer, qui fait taire la famine intérieure, apaise la folie de ne pas trouver d’écho, de rivage à toutes ces marées qui affluent et refluent en moi. La seule intimité qui pourra me combler et transmettre, tel un métal conducteur, le courant qui électrisera le corps.
Je tente d’exister, humainement, personnellement. J’essaie de ne plus être un anonyme assemblage de chair et d’orifices, une proie à ses yeux mais de devenir « unique » et non plus « une parmi tant d’autres ». Tisser ce précieux lien. Je cherche à sortir du jeu justement, à ne plus jouer.

Il cherche à ne rien livrer, rester en surface, surtout ne pas se dévoiler, surtout ne pas s’impliquer. Esquiver les questions, ne pas en poser non plus. Ne pas s’approcher de l’être, surtout pas. Le contourner méthodiquement. Conserver le cellophane bien hermétique sur les zones sensibles qui protège de toute émotion. Maintenir la distance suffisante.
« J’aimerais apprendre à te connaître », le sourire gêné, agacé, la phrase qui le hérisse. Pourquoi ? Parce qu’apprendre à se connaître c’est s’attacher, c’est ne plus être simplement deux corps vides et géométriques qui se consomment sans rien donner. Deux corps qui sonnent creux, faux. La jouissance mécanique.
S’il me connaît, si je deviens « quelqu’un », il sait qu’il ne pourra plus se comporter en salaud, me traiter comme une « chose » qui satisfait la pulsion et que l’on jette après usage (voire que l’on recycle pour d’autres occasions). Il y aura la culpabilité, peut-être même le tourment, la souffrance, le manque, la dépendance. Il faudra faire attention. A moi.
Et tous ces problèmes, ces contraintes il n’en veut pas, il veut garder l’insouciance, l’irresponsabilité, l’immunité parfaites. Ne surtout pas laisser ce foutu lien prendre racine ! Il fait donc tout pour rester dans le jeu. Un petit jeu qui doit rester sans conséquences.

Nous brodons ce fil invisible et muet en filigrane de nos actes, de nos mots, des pas en avant, en arrière.
Nous cherchons à imprimer nos motifs, à faire suivre à l'Autre ce chemin, notre chemin.
Une sorte de (douce et plus ou moins adroite) manipulation, oui, parce que la manipulation est l’essence de toute interaction humaine (je ne comprends pas l’intérêt de tous ces manuels qui crient au grand méchant loup et nous apprennent à « nous méfier des manipulateurs » alors que nous sommes tous à la fois manipulateurs et manipulés à un moment ou à un autre, à notre insu), à laquelle l’Autre adhèrera ou non.

Et si l’un des deux ne se rallie pas à ce pacte tacite qui sous-tend l’avenir de la relation, alors la partie s’interrompt, le jeu n’est plus possible. Chacun range ses pions, ses cartes et part chercher un autre joueur, une autre joueuse plus conciliant(e), plus adapté(e).

Voici le problème : personne ne veut jouer avec moi ou plutôt ne veut jouer comme moi. Il est vrai que je ne suis qu’une petite joueuse…

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Commentaires
Z
"Je ne suis qu'une petite joueuse"...J'adore!! ;)
K
La séduction est un jeu, pas l'amour.
S
bonjour à vous, <br /> c'est intéressant de vous lire, merci de vos messages, de votre gentillesse et lucidité sur mon "cas" !<br /> J'ai un peu touché le fond ces derniers jours, ce we ça va un peu mieux, j'ai honte de mes petits pbs existentiels de riche tandis que des catastrophes se produisent un peu partout sur la terre mais... le fait est que...<br /> <br /> Pour réagir un peu de ci de là, je ne cherche pas à cultiver ma différence, bien au contraire je rêverai de "fonctionner" comme tout le monde ! <br /> Si seulement c'était possible...<br /> Je n'ai pas envie de jouer, ça ne m'intéresse pas.<br /> Ou alors des jeux bienveillants et non pas destructeurs... des jeux qui rapprochent pas qui opposent.<br /> <br /> Potlach, oui j'ai eu ce doute à un moment mais pour avoir qd même réussi à grappiller 2,3 trucs il y a quand même une grande sensibilité (rare) chez lui qui me plait beaucoup... hélas !<br /> <br /> En me relisant il faut encore que je rajoute qqc pour être vraiment complète sur ce petit texte ou alors que j'écrive un petite suite complémentaire.<br /> je vais essayer de me motiver. j'écris pas mal en ce moment sur mon cahier (j'ai un cahier également en parallèle à ce blog) mais c'est un peu trop décousu pour que je le rapporte ici mais il y a pas mal de sujets (violence, humiliation...) qui me taraudent, c'est dommage que je manque d'énergie pour écrire dessus...<br /> <br /> je vous souhaite un bon we à toutes et tous et merci de vos présences chaleureuses et sincères !<br /> même si je suis lente à réagir, il y a des mots qui me touchent beaucoup.
M
Le sexe n'est pas forcément lasuite logique de l'amour. Je crois que l'on peut aimer sansavoir envie de coucher (et vice versa !)<br /> "La règle du jeu" ou "larègle du je" ?
L
Je lis "La règle du jeu", et j'entends "La fatalité de mon Je d'échecs"<br /> Ne joue pas avec quelqu'un qui sait mieux jouer que toi. Observe, mais ne cherche pas l'affrontement. Moins on a joué, moins on sait jouer, et plus on perd. Et parfois très gros.<br /> Laisse-le donc à son petit jeu de dupes, et essaie de trouver un véritable adversaire à ta démesure.<br /> A mesure que les gens se vident dans une vie banale et balisée, je pense que tu te ne cesse de te construire.<br /> Ne cherche pas à cultiver ta différence, à en faire un rempart contre les autres, mais n'abandonne rien de ton exigence sentimentale.<br /> C'est peut-être ce que tu as de plus précieux, beaucoup plus que ta virginité "hasardeuse" et encombrante.<br /> En tout cas, courage et bonne chance.
Standby
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