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Standby
6 février 2010

Il fait froid au paradis (fin)

Les passés amoureux s’esquissent, le sien surtout bien sûr. Je m’enhardis et le questionne sur la bague à son doigt, un anneau assez imposant de style celtique, qui m’intrigue. Il me révèle que c’est le cadeau d’une ex... Lui qui se déclare « célibataire par principe », affichant une moue de dégout à la mention du couple « monogame » est assez sentimental pour s’attacher à une bague, le symbole de l’engagement… « Cette bague c’est tellement moi… » ajoute-t-il rapidement, puis refuse d’en dire plus, regrettant même ce qu’il vient de confier, aiguisant à belle lame ma curiosité.
Je sens que je reste encore sur le seuil d’une porte qu’il refuse de m’ouvrir pour de bon.
Chaque minuscule parcelle de lui ne m’est livrée qu’après un âpre questionnement.
Pourtant il s’étonne de nouveau de parler « autant » avec moi, bien plus qu’avec ses amis me dit-il, et je sens gonfler de fierté et de joie la petite créature rose et flasque en moi.

Et puis c’est le cortège de ses conquêtes qui défile en ombres chinoises. « Les filles c’est toujours le même genre d’équation, toi tu es différente c’est ce qui me plait… ». Je cherche à extirper ce savoir féminin qu’il détient, quel genre d’équation, à une ou plusieurs inconnues ? « A plusieurs c’est encore mieux » s’empresse-t-il de répondre avec un large sourire, se réjouissant de l’allusion érotique que j’induis par inadvertance.

Que peut éprouver quelqu’un qui a serré tant de corps, goûté tant de peaux, de lèvres et de caresses ? Aura-t-il cette émotion, ce frisson qui me submergera si je m’abandonne à lui ? Je n’aurais pas la saveur de l’inédit, de l’inconnu… Je suppose que chaque expérience reste malgré tout unique même si les gestes sont les mêmes… Je crains d'être une simple modalité pratique, un énième froissement de chair. Etre spéciale. Inoubliable.

Il me laisse entrevoir un tourbillon flou de visages, bouches et corps consentants et audacieux, d’expériences de toutes sortes, sous des portes cochères, des lieux interdits, débridées, multiples, déviantes…
Des visions déferlent, je l’imagine en libertin dans des boudoirs tendus de velours rouges et de dentelles, au milieu de chandeliers de cristal, vêtu d’une chemise en soie à jabot ouverte sur son torse pâle et sec, ses lèvres sanguines plongeant avec voracité dans un essaim de jupes vaporeuses retroussées, de parfums capiteux et épicés…

Il cultive une fascination pour le divin marquis, ce qui me décontenance tout en m’amusant telle une enfant voulant jouer avec le feu. Dans quelle mesure dois-je le prendre au sérieux quand il déclare vouloir « me dominer », que je sois son esclave. C’était le but du petit jeu d’esquive et de manipulation qu’il m'a infligé cet été, m’avoue-t-il. Avec une maladresse touchante… L’apprenti manipulateur tombe le masque.
Il veut me faire (un peu) mal. Me vexer. M’humilier.
Il y a ces choses souterraines et sombres en lui, ces bas fonds, ces démons qui fermentent derrière son visage d’ange. Des choses que je ne comprends pas… mais qui m’attirent, pas en elles-mêmes, mais pour leur différence, ce qu’il est et ce que je ne suis pas. Ce qui m’échappe, ce mystère, cette complexité et ses arcanes, ces fêlures qu'elle recouvre.

Fantasme, fanfaronnade ou réalité ? Il s’inquiète de mon romantisme, de ma quête d’amour. « On ne recherche pas la même chose » assène-t-il soudain, me traitant de « pâquerette » tandis qu’il se définit comme un  « loup », d’un « Valmont » face à une « Cécile de Volange »…
« Ce que je recherche »… Ces mots m’assaillent subitement. Je réalise que ce n’est pas un schéma préconçu de couple, de « papa-maman » comme il me raille. Ce n’est même pas l’amour au sens idyllique du terme. Je n’en demande vraiment pas tant, mais juste être bien avec quelqu’un. Passer de bons moments, arracher au néant, à la solitude, à la souffrance, quelques parenthèses enchantées ou simplement de sérénité. Aussi éphémères soient-elles.
Je veux mon île de paix, d’insouciance, de rires, d’écho réparateur et bienveillant. Cette séduction qui affleure et pétille à la surface de nos paroles, nos regards.
Son attention, son écoute, mon attention, mon écoute, une compréhension de nos êtres profonds.
Un lien qui m’arrime à la vie.
Je veux me sentir belle et désirée par lui. Je veux me faire belle pour lui, quelqu'un à qui faire plaisir, à qui penser. Que ses bras restent un refuge possible quand je serai prête. Même si je suis encore impuissante à répondre à son envie de m’embrasser, de me prendre la main... et puis le reste bien sûr. Aussi immense soit le besoin d’aimer qui m’habite, mon corps reste inerte, mon ventre vide, incapable d’élan, d’envie physique tandis que mon cœur s’agite et se heurte à ses parois. Comme ces paralysés prisonniers du scaphandre de leur corps. Le syndrome « locked in », « bloqué de l’intérieur ».

Je sens sa balance intérieure osciller brutalement dans un sens puis un autre, en ma faveur ou contre moi… Des courants contraires s’affrontent en lui. La tentation violente de renoncer, son impatience, son égoïsme hédoniste, son habitude de conquérir vite et sans effort mais… un petit quelque chose le retient. Un petit quelque chose qui l’emporte. Au moins pour ce soir…

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Première partie de ce texte et Deuxième partie

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Commentaires
D
Je suis tes aventures depuis un bout de temps déjà, de manière un peu disparate certes, et à chaque fois que je reviens c'est la déception. "ne trouvera-t'elle jamais le bonheur?" mais le cherche-t-elle vraiment?<br /> <br /> Alors après tout ce temps permets moi de te poser une question: pourquoi toi plus que les autres, tu aurais droit à la relation parfaite sans plus chercher? Pourquoi toi, qui rêves d'une relation spirituelle quasi transcendantale tout en refusant de tenir la main de cet homme ne fut-ce qu'une seconde, tu mériterais de trouver sans ciller cet homme idéal? Nous rêvons toutes d'un homme tendre et compréhensif mais depuis quand obtient-on quoi que ce soit sans effort? Sans le moindre geste de conciliation? Rappelle-toi une chose: rien ne t'est dû tant que tu ne fais pas d'effort pour l'obtenir. Tu peux toujours attendre, jamais le bohneur ne viendra à toi par enchantement. Un baiser, une main qui sert la tienne, est-ce si terrible? Ne seraient-ce pas plutôt des moments enchanteurs, complices, éternels? l'acte d'amour est un acte magique , une renaissance et non une souillure. Et même si ça ne dure pas, ce sont des moments dont tu te souviendras avec plaisir. <br /> <br /> Laisse moi te donner un conseil: arrête de réfléchir et vis, agis. A force de réflexion, seule chez toi, tu t'es construit des mondes qui n'existent pas, des phantasmes qui n'existent que pour toi et qui t'empêchent d'avancer dans la vie réelle. La vie est faite d'expériences, bonnes, mauvaises et d'actes. Tu passes à côté de tout ça, d'année en année. <br /> Les hommes que tu rencontres sont incapables de comprendre tes pensées parce qu'elles sont trop compliquées, trop mûrement ressassées pour quiconque n'a pas lu ton blog du début à la fin. Arrête de tout compliquer.<br /> Alors même si tes récits sont ma foi bien divertissants pour tes fidèles lecteurs, je ne te souhaite qu'une chose : que tu délaisses ce blog, que tu délaisses tes craintes et tes fausses certitudes et que tu commences à vivre.<br /> Même si les commentaires de certains lecteurs ("c'est un salaud", "ne t'en fais pas ton jour viendra")te rassurent, ne te complais dans là-dedans. De belles paroles ne feront pas de toi une femme heureuse.
L
Un homme qui semble te concevoir comme une proie supplémentaire - même, et peut-être parce qu'il te trouve différente ( ce que tu es, indéniablement ) - je comprends aisément que la magie n'aie pu opéré comme tu le souhaitais.<br /> Rassure-toi, tu ne trouveras jamais l'homme qu'il te faut. Et c'est ça qui est passionnant.
N
Bonjour Standby,<br /> J'ai pas mal réfléchi à ce que tu as écrit (en particulier à l'effet "suis-moi, je te fuis, fuis-moi, je te suis"). Je pense que c'est non seulement un mécanisme propre au désir mais aussi une manifestation de ton manque de confiance en toi (du style: "comment un être qui semble si supérieur peut-il s'abaisser à mon niveau?"). Sur le sujet, je te conseille la lecture de "Petite philosophie de l'amour" d'Alain de Botton. <br /> J'espère que tu vas mieux et je te souhaite une bonne journée,<br /> Nathalie.
S
Voilà un texte qui m'a renvoyée quelques années en arrière, sans aucun plaisir je dois dire (à prendre comme un compliment pour ton écriture... on s'y croirait, beaucoup trop!).<br /> Ca ne t'interpelle pas cette manie qu'il a de ne pas discuter avec les femmes avec lesquelles il couche, et de discuter avec celle(s) qu'il ne touche pas? Drôle de rapport aux femmes,tout de même!
S
En ce qui me concerne, je n'ai rien lu dans tes écrits qui ressemble à du masochisme chez toi.<br /> Par contre j'y ai lu de la fascination pour un homme qui, toujours en te lisant, ne semble pas fait pour toi. Tout du moins c'est ce que je comprend en te lisant.<br /> Et comme toute fascination pour une personne, on est attiré, on a du désir lorsqu'elle est loin, ne donne pas de nouvelles ou nous repousse et quand on est en face de cette personne le désir s'estompe.
Standby
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