Ceci est mon corps
Je veux « m’offrir » (« me débarrasser de » ?). Je veux être la femme de. Je veux appartenir à quelqu’un. A un homme. Je n’en peux plus de tout ce fatras, de tout ce fardeau, là, de chair, de moi, de bras, de jambes, de ventre, de lèvres, de gouffres, de terminaisons nerveuses, nébuleuses, sentencieuses, filandreuses, silicieuses.
Je n’en peux plus, je n’en veux plus. A vendre. Promo. Tout doit disparaître. A louer. Don caritatif. A ramasser par les encombrants. A recycler.
Je n’arrive plus.
Je voudrais pouvoir avoir envie de dire (et le penser) à un homme : « Prends-moi ». Ceci est mon corps. Jeter toute cette glaise contre lui pour qu’il lui sculpte une forme, une raison d’être.
La nuit c’est horrible. L'heure où les réminiscences et les anxio
toxines tressent leurs ronces les plus épineuses autour des chairs
tendres. J’ai mal aux membres fantôme. Ils auront ma peau. Qu’ils la prennent, qu’ils la rongent.
Ils me réveillent dans leur néant douloureux.
Ils hurlent à la mort entre les draps. S'irritent contre le vertige du
vide.
Je
les comprime, je les fais taire par l’oreiller et l’édredon plaqués
contre. Je ne sais plus où les ranger, ça déborde, ça grouille, grince,
gémit, soubresauts. Je me débats contre leur sur-présence. Les bedtime stories ne font plus d'effet.
Laissez-moi dormir, laissez-moi m’évanouir, me dissoudre encore. Un peu... Pitié... Ne me harcelez pas la nuit aussi.
Ces derniers temps, je dors mal donc.